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L’Amérique prend tout – jusqu’à quand ? - Communiqué de presse - 7 janvier 2025

Alors que l’économie et la bourse américaine triomphent déjà, et depuis longtemps, le président américain Donald Trump promet d’en rajouter. Sa politique « pro-business » à l’intérieur (baisse des impôts, dérégulation) et commercialement agressive à l’extérieur, conduit le consensus à anticiper un nouveau choc asymétrique favorable aux Etats-Unis et défavorable au reste du monde. Quels éléments seraient susceptibles de perturber un tel scénario ?

Wall Street en lévitation ?

La valorisation des actions américaines semble de plus en plus tendue. Si l’on exclut l’année du Covid, elle se situe au plus haut depuis 2001 en termes de PER1 prospectif (21,7 au 31 décembre 2024), alors même que les taux réels à long terme sont à leur plus haut depuis plus de quinze ans. La prime de risque2 des actions par rapport aux obligations d’Etat a donc baissé pour atteindre un peu plus de 2% aujourd’hui, deux fois moins que sa moyenne historique. Cette prime reste cependant supérieure à son point bas de 1999/2000, lorsqu’elle était passée en dessous de 1 %.
L’envolée du PER de Wall Street a aujourd’hui deux composantes bien distinctes. La première découle du poids croissant (33% du S&P 5003 aujourd’hui, du jamais vu) d’une petite dizaine de géants mondiaux ultra rentables et donc chers (Nvidia, Apple, Microsoft, etc.). L’hyper croissance de leurs bénéfices – plus de trois fois supérieure à celle du reste du S&P 500 depuis le début de la décennie – s’étiolera forcément un jour mais le boom de l’intelligence artificielle semble a priori peu propice à un atterrissage immédiat.
La deuxième composante embarque l’ensemble de la cote. On peut l’estimer à l’aide du PER du S&P 500 équipondéré, qui, à environ 17 contre 16 en moyenne depuis dix ans, est certes élevé mais ne plaide pas en faveur d’un diagnostic de bulle. Reste que le PER équipondéré de Wall Street est devenu 35% plus cher que celui du reste du monde, un record. En termes relatif, le thème de « l’Amérique prend tout » parait donc de plus en plus intégré dans les prix des marchés.

Le mix croissance-taux d’intérêt américain en question

Le scénario « Boucle d’or » d’une économie américaine ni trop chaude ni trop froide se déroule devant nos yeux depuis 2023. La maturité du processus de désinflation et l’arrivée de Donald Trump questionnent la poursuite de ce scénario. Sa politique – dont on ignore aujourd’hui l’agenda et les contours exacts – pourrait en effet s’avérer inadaptée à la phase actuelle du cycle. Combinées à un net ralentissement de l’immigration et de fortes hausses des droits de douane, les baisses d’impôts pourraient faire renaitre le thème de la surchauffe et stopper, voire inverser, la dynamique baissière des taux d’intérêt à court terme. Connaissant la sensibilité du cycle financier global à la dynamique des taux d’intérêt et de la devise américaine, cela ne présagerait rien de bon.
Ce scénario de risque est déjà en partie dans les prix, les marchés anticipant que la Fed ne pourra baisser les taux en dessous de 4% en 2025, contre 4.25-4.50% aujourd’hui. Quant aux taux réels à long terme, ils sont déjà revenus à leur niveau d’avant la crise de 2008, à plus de 2%. Enfin, le marché du travail a sensiblement ralenti en 2024, ce qui réduit les risques d’un retour rapide au scénario de surchauffe. Mais nul doute que les chiffres d’inflation américains seront scrutés avec une grande attention par les investisseurs.

1 Le ratio PER est le rapport entre le cours d’une action et le bénéfice net par action dégagé par l’entreprise. Il peut donc être calculé annuellement, trimestriellement (PER glissant), ou encore, de manière prévisionnelle.
2 La prime de risque est un concept de finance qui désigne un supplément de rendement exigé par un investisseur afin de compenser un niveau de risque supérieur à la moyenne.
3 L’indice S&P 500 est un indicateur boursier qui suit la performance des entreprises américaines cotées en bourse.